En 2002, Dominique Bucheton affirmait « Je crois profondĂ©ment quâapprendre, câest se dĂ©placer (âŠ). Pour que les enfants apprennent, et jâen suis de plus en plus convaincue, il faut crĂ©er des situations didactiques oĂč les dĂ©placements soient en mĂȘme temps cognitifs, intellectuels, psychoaffectifs, identitaires, langagiers ». (Extrait de Devenir lâauteure de sa parole Eduscol janvier 2002)
A travers la ressource Mathscitymap, nous nous sommes interrogĂ©s sur lâimpact dâune activitĂ© hors les murs sur lâapprentissage des mathĂ©matiques.
- Quâest-ce quâenseigner hors les murs ?
Se dĂ©placer induit de facto sortir de la classe mais « sortir », en soi, nâest pas forcĂ©ment gage dâapprentissage tel que le conçoit lâĂ©cole. En effet, en se rĂ©fĂ©rant aux travaux de Tricot et Sweller, on peut catĂ©goriser 2 types dâapprentissages : les connaissances primaires et les connaissances secondaires.
Ainsi, la sortie « plein air » devient un outil didactique au service des apprentissages. En mathĂ©matiques, il sâagira de contextualiser les savoirs dans le but de les rendre accessibles et concrets pour les Ă©lĂšves. On ne va pas se balader seulement pour le plaisir, on sâattelle Ă intĂ©grer les mathĂ©matiques dans le quotidien, dans les savoirs collectifs, dans la culture gĂ©nĂ©rale. Lâobjectif poursuivi est dâancrer les apprentissages dans le rĂ©el soit en confrontant les compĂ©tences au rĂ©el soit en partant du rĂ©el pour acquĂ©rir des compĂ©tences.
2. Pourquoi enseigner hors la classe ? une approche des neurosciences
Les sciences cognitives ont identifiĂ© quatre facteurs principaux de rĂ©ussite dâun apprentissage : lâattention, lâengagement actif, le retour dâinformation, et enfin, la consolidation.
- Lâattention, un filtre quâil faut savoir captiver et canaliser : il nous permet de sĂ©lectionner une information et dâen moduler le traitement.
Le support de travail qui est « concret », des modalitĂ©s de travail par petit groupe oĂč chacun a sa place, complĂ©tĂ©s par du temps et des allers-retours avec la classe pour mieux comprendre les enjeux des savoirs dans la vie courante et les transfĂ©rer dans dâautres situations peuvent ĂȘtre des stimuli face Ă la tĂąche demandĂ©e.
- Lâengagement actif : le principe directeur est on ne peut plus clair : un organisme passif nâapprend pas.
Lâenseignant ne peut mobiliser que si lâenfant ou apprenant se mobilise.
En diversifiant les modes dâapproche, on crĂ©e aussi de la motivation et chez certains Ă©lĂšves la sortie pourra crĂ©er un dĂ©clic et donner du sens aux apprentissages. Câest une mise en rapport de lâĂ©lĂšve avec lâobjet math dans un contexte diffĂ©rent.
Une activitĂ© de plein air favorise lâengagement de toute la personne de lâĂ©lĂšve avec tous ses sens, pas seulement la vue et lâouĂŻe comme en classe, mais aussi son toucher, son odorat et encore sa sensibilitĂ© et son affect. (Amiel & Ferrerons, 2013).
- Le retour dâinformation : si lâactivitĂ© plutĂŽt quâune Ă©coute passive est capitale, elle ne suffit pas. Pour lâĂ©lĂšve,
ce retour rĂ©flexif est une voie propice pour accĂ©der Ă une meilleure comprĂ©hension de la notion Ă©tudiĂ©e. Par ce travail, il dĂ©couvre aussi son propre fonctionnement intellectuel et gagne en autonomie. Pour lâenseignant, cela permet de dĂ©couvrir les dĂ©marches dâapprentissage des Ă©lĂšves, dâidentifier leurs besoins, de diffĂ©rencier les approches pĂ©dagogiques, de les Ă©valuer avec pertinence.
- La consolidation et lâautomatisation : pour combattre l’oubli et consolider dans un temps long, l’Ă©lĂšve doit pouvoir Ă©tudier la mĂȘme notion Ă plusieurs reprises. C’est au prix de cette rĂ©pĂ©tition dans le temps de lâapprentissage quâil acquerra des connaissances qu’il pourra mobiliser des annĂ©es plus tard. En ce sens, une approche en plein air est un levier pour permettre Ă lâĂ©lĂšve de voir/revoir/re-revoir et ancrer durablement les notions, les savoirs dans le temps long, et dans dâautres contextes.
3. Les mathématiques en plein air, un moment en rupture avec les temps habituels en classe qui profite aux apprentissages mathématiques
Matthias Ludwig, chef du projet Math City Map Ă lâUniversitĂ© de Francfort a donnĂ© le 15 mai 2019 Ă lâIREM de Paris le rĂ©sultat des Ă©tudes menĂ©es sur lâutilisation de cette application. Une synthĂšse dâĂ©tudes amĂ©ricaines (Kuo, Barnes et Jordan 2019) a Ă©galement pu dĂ©montrer plusieurs effets de la pratique hors la classe de lâenseignement.